EPL, le plus petit groupe de guérilleros colombiens

Louis G.K. Ferrand, Bogotá 

 

Preuve du grand nombre d’acteurs présents dans le conflit Colombien, l’EPL représente le plus petit groupe de guérilla marxiste encore actif. Qui est-il ?

 

L’EPL (Ejercito Popular de Liberación) ou armée de libération populaire en Français est aujourd’hui l’un des derniers groupes de guérilla opérant en Colombie. En effet, cette milice compte 152 combattants selon des sources gouvernementales colombiennes et elle est surtout présente dans le Département du « Norte de Santander », une région de Colombie à la frontière du Venezuela. La zone montagneuse où ce mouvement insurrectionnel est implanté s’appelle le Catatumbo, et il se trouve sur la frontière colombo-vénézuélienne ce qui représentait et représente toujours durant l’histoire du mouvement, une solution de repli pour les guérilleros. Cette milice n’est plus que le reliquat du mouvement du même nom qui fut démobilisé à hauteur de 95 % de ses effectifs en 1991. Les démobilisés ont formé le parti politique Esperanza, Paz y Libertad soit en français, Espoir, paix et liberté.

 

 

Ce nouveau parti politique actif surtout dans le département d’antioquia avait une influence importante sur le Sintraingro, qui était le syndicat des travailleurs des bananeraies. Syndicat qui regroupait près de 12 000 membres dans les années 90. En outre, le mouvement parvient à faire élire des conseillers municipaux dans toute la région productrice de bananes de Colombie. Ce qui lui conférait alors une certaine force politique.

 

A l’origine l’armée de libération populaire avait adopté une idéologie fortement marquée à gauche. Ils se revendiquent toujours aujourd’hui comme étant un groupe communiste, marxiste-léniniste mais également fait plus étonnant, comme un groupe hoxhaïste. Cette idéologie est issue de la guerre froide et précisément d’un ancien pays satellite de l’URSS, l’Albanie. Ce courant du socialisme se démarque par le fait qu’il prône une interprétation rigide du marxisme-léninisme dans sa version stalinienne et également par sa volonté de fermeture au monde extérieur. L’actuel EPN est dirigé par Bernardo Gutiérrez depuis 1991. L’on peut voir dans cela une illustration du dernier commandement du groupe qui prône un culte de la personnalité autour du dirigeant.  Il compta lors de son apogée près de 5.200 combattants ce qui lui conférait de facto la troisième place dans les plus grands groupes de guérilla en 1980 après les FARC et l’ELN. L’EPL était principalement financé par des séquestrations, des extorsions et du blanchiment d’argent, dans les régions d’Antioquia, de Caldas, de la Guajira mais surtout dans le Norte de Santander. L’armée de libération populaire fut à l’origine créée en 1965 pour combattre d’abord politiquement l’influence des grandes compagnies bananières, puis elle prit les armes à partir de 1968.

 

Les forces sécessionnistes de l’EPL qui continuèrent le combat contre le gouvernement et aussi contre les différents groupes et acteurs du secteur qu’ils soient paramilitaires ou guérillas ayant des idéologies proches, comme l’ELN, furent, en 1996, désignées comme guérillas rurales par les institutions internationales et le gouvernement de l’époque.

 

Intéressons-nous maintenant plus particulièrement à leur situation actuelle. En 2016, on assiste à un changement de cap idéologique. L’EPL s’est allié avec le groupe criminel « Los Pelusos », spécialiste dans la production de drogues. Fort de cette alliance, l’EPL a su écarter tous les autres groupes criminels dans la région du Norte de Santander et s’imposer comme le premier producteur de substances psychotiques de la zone. Une source de revenus bien rentable qui s’est vue complétée par le racket des émigrants vénézuéliens fuyant leur pays.  En 2017, l’EPL est toujours actif, principalement dans la zone du Catatumbo, zone du nord-est de la région Norte de Santander. L’armée populaire de libération a pu reprendre des zones laissées vacantes par des groupes FARC qui ont signé un traité de paix avec le gouvernement l’année dernière et déposé les armes. Selon la fondation des idées pour la paix en Colombie (FIP), l’EPL est l’un des principaux groupes armés “saboteurs de la paix” dans la région du Catatumbo et la paix n’y sera pas complète tant que l’EPL continuera ses actions, d’autant que d’après des paysans locaux, le groupe “n’acceptera jamais une capitulation”. Pourtant, un message circule actuellement dans la région du Catatumbo mentionnant la volonté des dirigeants du mouvement d’entamer des pourparlers avec le gouvernement.

L’EPL doit-il sa survie au changement de cap idéologique et à son alliance avec les groupes narcotrafiquants qu’il combattait auparavant ?

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