Les enjeux du cannabis en Colombie

Nicole Mendieta, Sarah Quintana et Juan Martin Vargas, Bogotá 

 

Le territoire colombien a beaucoup souffert des conséquences du trafic de drogues depuis les années 80 et 90, mais il s’agit toujours d’un thème majeur dans les débats d’aujourd’hui. Depuis de longues années, le gouvernement a du faire face aux nombreuses pressions et manifestations en faveur de la légalisation du cannabis. Dans le pays, la production de cannabis constitue un marché noir milliardaire, deux ou trois grammes s’échangent à 30 000 COP (environ 10 USD).

 

Ainsi,  en 2016 la Colombie est devenue le quatrième pays latino-américain  à avoir légalisé la production de cannabis à but médicinal ou scientifique. Et une loi polémique sur la production de celle-ci fut approuvée dans la foulée.

L’effet fut immédiat. Ce secteur attire de nombreux investisseurs et, à partir de 2019, l’OICS (Organe international de contrôle des stupéfiants ou en espagnol JIFE) a laissé la voie libre à la Colombie pour qu’elle puisse produire de manière légale 40,5 tonnes de cannabis, soit un quart de la production mondiale.

Aujourd’hui, 21 entreprises nationales et étrangères ont le permis du gouvernement pour cultiver cette plante, pour avoir des laboratoires et pour manipuler,  sous la stricte vigilance de l’Etat, des dérivés du cannabis, comme par exemple des huiles ou sérums. Néanmoins, la vente de la plante brute n’a pas encore été approuvée.

D’après les experts, grâce à la position géographique du pays et de ses conditions climatiques, la Colombie est le lieu parfait pour la production de cannabis. Et son coût de production est entre 5 et 8 fois moins cher qu’au Colorado (USA), ou au Canada. Selon l’entreprise américaine Ackrell Capital, en 2025 la Colombie pourrait produire pour 1,5 milliards de dollars dans ce domaine.

 

La production et commercialisation de cannabis pourraient devenir un domaine de développement économique et social du pays, au regard des expériences internationales.

Aux USA, dans l’état de Californie, cette industrie a connu un grand succès. Le territoire est devenu le premier marché mondial légal du cannabis, et on estime que pour 2021, ce commerce devrait générer 5,8 milliards de dollars.

De son côté, l’Uruguay s’est doté d’une législation forte dans ce domaine. Depuis 2013, la loi nommée “Ley Marihuana” ou “Loi Cannabis” a été approuvée avec pour principal objectif le traitement de maladies, mais aussi la protection de la population vis-à-vis des risques qu’impliquent le commerce illégal et le trafic de drogues ; notamment, l’utilisation de substances psychoactives de qualité douteuse et l’incidence du trafic et crimes organisés (Articles 3 et 4 de la “Loi Cannabis”). L’Uruguay est ainsi devenu le premier pays d’Amérique Latine où il est possible d’acheter légalement du cannabis dans les pharmacies (en sachet de 5 grammes). Ce cannabis qui est produit par l’Etat uruguayen.

De fait, en Colombie,  depuis 2011 déjà, les consommateurs pouvaient porter un maximum de 20 grammes de cette plante sans être considérés comme délinquants.

 

Avec les élections présidentielles de mai 2018,  le sujet refait surface dans le débat politique, et est devenu un enjeu important pour les candidats, afin de gagner plus de voix. Et les courants de pensée sont bien différents.

 

Certains avancent que la consommation de cannabis est un problème de santé publique et que l’on devrait éduquer la population. D’autres vont plus loin en affirmant que la consommation de cannabis ne sert à rien et, que la légalisation de la détention personnelle,  n’a pas aidé à  lutter contre le trafic de drogue. Par conséquent, il faudrait la rendre illégale et son trafic passible de prison comme dans les années 90. Enfin, quelques-uns souhaitent que le cannabis soit légalisé pour une consommation à but récréatif dans des centres spécialisés (comme les “coffee shops” à Amsterdam).

 

Si cette idée était validée par le gouvernement colombien, la loi pourrait s’inspirer du référendum sur la légalisation de la drogue en 2016, dans l’État de la Californie qui est devenu emblématique. La loi y encadre parfaitement les pratiques. Par exemple, seules les personnes âgées de 21 ans ou plus sont autorisées à acheter le produit, 28,5 grammes par personne maximum, et exclusivement dans des magasins autorisés. De même, pour respecter la jeunesse, la loi californienne affirme que le produit ne peut pas être consommé dans une zone située à moins de 300 mètres d’une école ou d’un parc pour enfants. Enfin, la culture du cannabis est autorisée par les ménages, avec un maximum de 6 plantes cultivées.

En Californie, la légalisation du cannabis a été couronnée de certains succès. La violence de l’État envers ses habitants a beaucoup diminué (la police fédérale n’entre plus en conflit avec les consommateurs) et le marché noir a connu une forte chute. De même, de nombreux ex-trafiquants peuvent maintenant travailler dans ces domaines de manière légale et transparente.

 

Ainsi, la Colombie est un pays où 87% des consommateurs de substances illégales consomment du cannabis, avec une certaine tolérance des pouvoirs publics. Néanmoins le pays est encore loin de voir dans sa législation, l’approbation de la consommation du cannabis à but récréatif.

 

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